Voilà que je m’apprête à écrire un de ces looooooooongs billets dont j’ai le secret!

J’ai beaucoup hésité à le faire – et j’alerte ici le lecteur averti que vous êtes -, car il s’agit de ma vision personnelle, probablement pas celle de mes petits camarades de la session, encore moins celle des personnes s’occupant du FI.

Je vais donc parler ce qu’on y fait, de ce qu’on y trouve, de ce qu’il y manque, des frustrations comme des joies.

Il s’agit donc ici de retranscrire au mieux ce que j’ai vécu tout au long de la seconde session du Founder Institute à Paris, qui m’est personnelle. En outre, avec les enseignements de la session qui vient de se terminer, les organisateurs vont amener des ajustements dans la troisième, pour ceux qui s’apprêtent à y entrer.

Quelques mots tout d’abord pour placer le FI Paris :

– Durant 4 mois, le FI Paris propose, à tous ceux qui souhaitent monter un projet web depuis la France, de les soutenir et aider, par le biais de :

– cours du soir, une fois par semaine, donné par des mentors au parcours reconnu dans le monde de l’entreprise technologique
– séances personnelles ponctuelles avec les « facilitateurs » français – j’y reviendrais plus tard – ou Adeo Ressi, le créateur de FI
– séances bi-hebdomadaires avec les autres fondateurs

Ces fondateurs ne sont pas choisis sur leur idée pour entrer au FI, mais sur un test payant, qui rend compte de leurs « aptitudes » à devenir un futur entrepreneur. Ce test, à faire sur le web, est formé de deux phases : l’une sur votre intelligence pure (genre test QI), l’autre sur votre comportement.
Suite à cela, vous êtes retenus, ou non, pour intégrer la session du moment.
Cela signifie une chose, très importante à mes yeux : même si vous n’avez pas d’idée, mais que vous avez l’âme, le désir, le feu de construire une société, de développer quelque chose à partir de rien, vous pouvez postuler pour le FI Paris!
Vous pouvez en savoir plus sur un tel test ici

– Le coût est de 900€ par participant. Nous, nous étions deux, cela nous a tout de même coûté 1.800€.
Je crois savoir que ce montant peut vous être retourné si vous décidez de ne pas poursuivre dans le premier mois. Et n’allez pas croire qu’ils s’enrichissent sur ces 900€, cela ne sert qu’à payer les voyages et hébergements des mentors, souvent venus des USA.

– A la fin du deuxième mois ou début du troisième, vous devez avoir créé votre société en statut SAS.
Oui, vous avez bien lu! Car le principe du Founder est d’entrer, à hauteur de 3,5% par le biais de Warrant (genre de Bon de Souscription d’Actions dits BSA) , dans le capital de votre société. Et si vous n’avez pas de société, ce document contractuel ne peut être passé entre eux et vous.
Que je vous explique un peu – et que l’on me corrige si je décris une ânerie – : le Warrant est une forme de promesse de vente, qui permet à celui qui le détient, d’acheter à un cours bas au moment même où il revend.
Pour le Warrant FI Paris, il a 10 ans pour l’exercer, au prix de la première levée.
Ce pool constitué est à partager en parts à peu près égales entre les fondateurs(30%), les mentors(30%), les « facilitateurs »(25%) et le FI(15%) : cela signifie que vous possédez aussi une part des sociétés qui seront créées en même temps que vous! Et ça, c’est très fort!!!
Exemple : Vous avez fait une 1ère levée à 150k€ pour 25% de votre boîte, valorisant celle-ci à 600K€ lors de cette levée. Et le FI Paris décide de vendre ses 3,5%, 5 ans plus tard, durant une sortie où votre boîte vaut 50 M d’€.
Ainsi, le FI va acheter en même temps ses 3,5% pour la modique somme de 21K€ (3,5% de 600K€) en les revendant pour 1,75 M€. Ce qui donne la somme de 1.729.000€!
Admettons que 10 sociétés soient sorties lors de votre session, elles se partagent alors chacune, 1 dixième de 30% de cette somme soit un peu moins de 52.000€, ce qui n’est pas rien!
Par contre, je ne saurai dire ce qui arrive si la société ayant signé n’existe plus au moment de la sortie : j’imagine que ce n’est pas le fondateur qui récupère cet argent? :/
C’est donc bel et bien ici le modèle économique du Founder Institute : on comprend donc bien qu’il a tout intérêt à créer des sociétés viables, fortes, à fort potentiel, et à nous aider dans le temps!
A noter qu’ils se récupèrent aussi 4,5K€ lors de la première levée, si celle-ci dépasse 40.000€.
De toute façon, il faut compter sur eux pour chaque levée, puisqu’ils sont donc vos associés de fait, même si, avant d’exercer le Warrant, les 3,5% ne leur appartiennent pas vraiment : vous détenez bien 100% de votre boîte!

– Le FI ne propose pas de locaux : les sessions de mentoring se tiennent dans de grande salle chez Microsoft ou chez BNP paribas; et les sessions entre co-fondateurs se tiennent à un endroit convenu entre eux, Skype étant très bien aussi.

– Entre chaque session de mentoring, qui correspond à un sujet précis, vous avez des assignments à rendre via le web par écrit, en échangeant avec les membres du groupes de fondateurs avec qui on vous aura assigné. Ce groupe change toutes les 4 semaines environ.

Bon, en fait de quelques mots pour placer le FI, vous en savez déjà pas mal 😉

Parlons un peu des mentors du FI, des « facilitateurs » et des co-fondateurs:

Pour être mentor du FI, il faut avoir créé une société tech qui a réussi.
Cette année, je dirai que 50% furent des participants américains, l’autre partie étant des français.
Il faut donc plutôt avoir un bon niveau en anglais, d’autant plus que vous serez amenés à faire vos pitchs dans cette langue.
Perso, j’en ai toujours été incapable, tant mon niveau en anglais en faible. Je me corrige chaque jour un peu plus, mais bref, ce fut un vrai handicap!
Heureusement, Sylvie pouvait m’éclairer par la suite, mais certaines sessions furent de vrais tortures…

Néanmoins, cela n’est pas trop un problème en soi, car les mentors ne sont pas la vraie valeur ajoutée du FI.
Oui, ce sont des pointures.
Oui, ils savent de quoi ils parlent.
A chaque session, 3 personnes devront pitcher devant eux et vous feriez mieux d’écouter ce qu’ils disent car c’est en général très intéressant et formateur pour votre projet.

Mais le soucis est qu’ils sont absents ensuite : difficile à rencontrer, à contacter par mail, peu impliqués dans vos projets… A part 2 ou 3 qui reviennent régulièrement, ne comptez pas trop sur leur présence pour faire grandir votre projet, en dehors des sessions de mentoring : je dirai donc qu’il est important de bien préparer, non pas ce qui suit la session, mais celle qui arrive.
Lorsqu’il y a un sujet un soir de Founder, préparez vos questions sur le sujet à l’avance, et quoi qu’il dise durant son discours, bombardez ensuite de ces questions! Nous, cette année, on s’est un peu loupé…

Non, la vraie valeur ajoutée du Founder, ce sont les autres fondateurs, comme vous, qui galèrent à comprendre, définir leur idée, trouver des infos, packager leurs produits et commencer leur prototype.
Avec eux, vous allez grandir. Avec eux, votre produit va s’imprégner de leurs retours, de leurs propres progressions, de leurs amitiés aussi.
En outre, le fait que le Founder nous intègre tous dans un même pool au niveau du Warrant nous rend tous plus ou moins associés, et cela motive aussi un peu, même si ce n’est pas le plus important.

Enfin, les « facilitateurs » du Founder Institute Paris sont là pour vous reprendre, vous aider dans vos doutes, essayer d’élaguer les idées parasitaires et surtout s’occuper de l’organisation des sessions, de trouver les mentors…
Sur Paris, ils sont au nombre de deux : Alain Baritault, toujours sur Paris,et Alain Raynaud, plutôt aux US.
Lors de sessions en tête à tête avec eux, on peut parler de ses difficultés, doutes, questions, etc… Ils essaient alors de nous conseiller, de nous faire entrer dans tel ou tel réseau, mais il faut bien avoir en tête que ce n’est pas eux qui vont monter votre boîte à votre place, ou dénicher la personne miracle.
Nous avons pas mal douté d’eux au début, car on s’attendait peut-être à davantage d’aide de leur part, à ce qu’ils lisent nos assignments, ce qui n’est pas le cas…

Mais le soucis vient plus que le modèle Founder Institute a du mal à passer en France tel quel.
En effet, des doutes complexes assaillent vite l’entrepreneur français, des trucs basiques, des trucs à la con, bref : l’administratif français et son état d’esprit…

Et là, le Founder n’amène pas le plus petit brin d’aide, alors que je pense sérieusement que c’est un beau merdier, et que l’entrepreneur, durant ses 4 mois, passe la moitié du temps à penser : pacte d’associés, documents pour créer sa société, course chez Pôle Emploi pour savoir quels sont ses droits, discussions avec son employeur pour savoir ce qui est le mieux, les aides, etc…
Il faudrait que toutes ses cochonneries, même si elles sont à réfléchir avec le fondateur, ne soient pas des parasites lors de ses semaines, très intenses.
Or, c’est le cas, la création de la société imposant ces étapes! Pour aider un peu, j’ai écrit un billet il y a qqs semaines à propos de la création d’une SAS ,en reprenant notre expérience directe. C’est toujours bon à prendre, même si c’est loin d’être exhaustif, hélas.

L’entrepreneur français se meut alors tour à tour en secrétaire de direction, chômeur en devenir, juriste, comptable, fiscaliste, etc… au lieu de penser à faire du business, à penser son produit, sa société, à développer un prototype. Et dans les deux premiers mois, cela fait beaucoup…
Or, il faut créer sa boîte, c’est une condition sine qua non.

Quelque part, cela élague et ne conserve que les plus motivés et les plus convaincus du système FI : nous partîmes 40 le premier jour, mais par un prompt non-renfort, nous ne fûmes que 9 sociétés à être graduées le 8 février dernier!
En cours de route, vous n’êtes pas seuls à décider si vous restez ou non : si Adeo estime que vous n’êtes pas prêt, pas motivé, que votre projet a besoin de plus de 4 mois pour être conforme à l’idée qu’il se fait d’une bonne idée, vous serez débarqué par le Founder pour cette session, qui vous donnera la possibilité de revenir à la suivante, plus mûr et plus prêt à surgir tel le félin sur sa proie (oui, je mégare, je fatigue, en fait… Désolé)

Revenons sur le soucis de l’emploi et des revenus durant cette période!
L’écosystème en France, en phase d’amorçage, étant ce qu’il est, il est vain de penser lever de l’argent sur une idée : ici, les BAs se basent sur des choses terriblement concrètes!
N’espérez donc pas créer un Facebook en France, personne ne vous passera de l’argent si vous n’avez déjà pas un CA, une traction : en gros, si vous n’avez déjà pas créé votre prototype avec votre sueur et votre bas de laine.
Petit bémol à ce discours réaliste: sachez que lors de la première session, un des fondateurs a réussi à lever de l’argent pour faire son prototype, en pleine session! Je souhaite donc à ceux des sessions suivantes de rencontrer un tel succès!

Ainsi donc, être au chômage durant votre période de gestation peut être une bonne chose : Pôle Emploi est le premier Business Angel de France!
Et là encore, il va falloir chercher par vous-mêmes : contrat de travail avec votre employeur, rupture à l’amiable, etc… Pas de connaissance au sein du FI pour cela, induisant donc des tracas parasitaires supplémentaires…
Il est vraiment dommage qu’un agent de l’Etat ne soit pas présent au sein du FI pour se charger de collecter ses infos et de les partager une bonne fois pour toute!

A la fin de la session, vous aurez une session de pitch devant investisseurs. Cela permet de créer un contact, une ouverture avec eux, mais ne vous leurrez pas, pas de lever.
Une levée en France va prendre de 3 à 9 mois, le FI vous met le pied à l’étrier. A la sortie, c’est le début de l’aventure!

Alors, en conclusion, que peut-on dire, du point de vue de Dress-Me?

Dress-Me a énormément évolué grâce au Founder Institute, mais pas grâce à ce que nous pensions de prime abord.

Pour faire simple, voici comment je le vois :
– Le FI rassemble des femmes et des hommes qui n’en veulent et qui peuvent d’ailleurs se trouver des affinités et créer ainsi une seule et même équipe. On a eu des exemples réussis!
– Les mentors vous emmènent leur savoir sur un point précis de votre vie de startuppeur techno
– Ce savoir infuse au sein des groupes de fondateurs, avec les façons différentes d’appréhender ces idées selon que l’on est techos, biz, marketeux, design ou historien en sciences occultes!
– Le renforcement de toutes ces idées, partagées, triturées, débattues avec les autres vont cimenter vos liens, votre perception de votre propre projet et faire émerger une idée bien plus « focus » et pertinente
– Le recentrage d’Adeo (au moins une fois) et des « facilitateurs » vont finir de créer un produit qui a sa place au sein des startups mondiales

A ce sujet, svp, ne pensez jamais « France Only, Suisse May be » pour votre startup : la France, c’est le village du coin dans lequel vous allez tester votre idée, peu un environnement viable à lui tout seul.
Voyez plus grand, très vite : donc un produit scalable! Si c’est sur l’élevage de cuisse de grenouille, c’est même pas la peine…
Ecoutez, Alain Raynaud à ce sujet : les petits français sont timorés.
On a peur d’être des winners, se mesurer aux vilains méchants ricains nous fout la ch’touille, ou encore, on veut pas être de vilains capitalistes qui gagnent des millions, se faire 2 ou 3 fois le SMIC nous suffit jusqu’à le retraite.
Si c’est votre ambition, n’allez pas au Founder Institute, vous allez perdre votre temps et le leur.

En terme d’ambition, on a un soucis de taille en France car on pense souvent trop à soi et trop petit.
On veut sa petite vie tranquille, ne pas gêner, avec un salaire suffisant pour être à l’abri du besoin, mais pas se faire chier à mener des femmes et des hommes, à embaucher et donc à virer, à faire tout bonnement une belle entreprise car alors, c’est rejoindre le côté obscur.

L’image de l’entreprise en France, au dessus de 10 salariés, est très négative. Et c’est un tort.
Vous pouvez être un très bon patron, sans être un souilleur de plage bretonne ou un incitateur au suicide.
Mais c’est clair, vous passerez de l’autre côté de la barrière, et il faut vous y préparer.
Ambitionner devenir un grand acteur du web signifie vouloir devenir gros, important, imposant, gênant. Et donc jouer des coudes, ce qui n’est pas aisé dans un pays où le culot est plutôt mal vu.
Si vous entrez dans le FI, vous aurez accès à toutes les vidéos de tous les mentors dans le monde. Vous verrez la différence d’ambiance aux USA et en France, où tout parait plus policé, et universitaire.
C’est un tort de notre part, mais il est difficile de changer une éducation de décennies où la culture et l’enseignement sont élevés au rang d’icône.
Nous avons la chance de voir un enseignement américain simple, très concentré et ultra spécialisé venir à nous, nous aurions torts de nous en passer.

Le passage au Founder Institute a t’il été bénéfique pour Dress-Me?
Oui!
Cela nous a t’il permis de lever des millions?
Non. Mais ils sont encore là pour nous suivre et nous y aider, car c’est dans leur intérêt!
Et les « anciens » de la première session, et désormais de la seconde, seront aussi là pour vous aider, car le Founder a su créer une dynamique et une cohésion extraordinaire entre fondateurs!

Alors, prêt pour l’aventure Made in USA en plein Paris?


Les photos de ce billet sont issues de trois sources :
– Nous-mêmes lors d’une session de pitch chez nous entre fondateurs, et avec Alain baritault
– Mathieu Jehanno, fondateur de Learniz, tjrs lors de cette même session
– Martin Pannier, fondateur de Picuous, lors de la graduation du 8 février 2011

Dernière chose : pour les inconditionnels de Twitter, suivez le hashtag : #pafi